Social

L’entreprise et les salariés 

Revue de récentes décisions de la Cour de cassation, en matière de droit du travail.

Harcèlement moral

Pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'estimer si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du Code du travail. Dans l'affirmative, il lui revient d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. (Cass. soc., 20 octobre 2021, pourvoi n° 19-23844).

Rupture conventionnelle

En l’espèce, la cour d’appel avait relevé qu’à la date de la signature de la rupture conventionnelle, l’employeur, informé par la salariée de faits précis et réitérés de harcèlement sexuel de la part de son supérieur hiérarchique, n’avait mis en œuvre aucune mesure visant à prévenir de nouveaux actes et à la protéger. Celle-ci, qui se trouvait ainsi dans une situation devenue insupportable et dont les effets pouvaient encore s’aggraver si elle se poursuivait, n’avait eu d’autre choix que d’accepter la rupture et n’avait pu donner un consentement libre et éclairé. Pour la Cour de cassation, la cour d’appel, qui a fait ressortir l’existence d’une violence morale, a justifié sa décision d’annuler la rupture conventionnelle. (Cass. soc., 4 novembre 2021, pourvoi n° 20-16.550).

Durées de travail

La preuve du respect des seuils et plafonds prévus par le droit de l'Union européenne et des durées maximales de travail fixées par le droit interne incombe à l'employeur. (Cass. soc., 20 octobre 2021, pourvoi n° 20-11933).

Modification du contrat de travail

Le seul refus par un salarié d'une modification de son contrat de travail ne constitue pas une cause réelle et sérieuse de licenciement. La rupture résultant de ce refus d'une modification de son contrat, proposée par l'employeur pour un motif non inhérent à sa personne, constitue un licenciement pour motif économique. (Cass. soc., 20 octobre 2021, pourvoi n° 20-15826).

Liquidation judiciaire

L'assurance des salariés contre le risque de non-paiement, en cas de liquidation judiciaire, des sommes qui leur sont dues en exécution du contrat de travail couvre les créances résultant de la rupture des contrats de travail intervenant dans les 15 jours suivant le jugement de liquidation et pendant le maintien provisoire de l'activité autorisé par le jugement. Enfin, ni la liquidation judiciaire, ni la cessation d'activité qui en résulte, n'entraînent en elles-mêmes rupture du contrat de travail. En l’espèce, dès lors que les sommes n'étaient pas dues à la date du jugement d'ouverture de la procédure de liquidation, qui prenait effet dès la première heure du jour de son prononcé, et que le contrat de travail n'avait pas été rompu par le liquidateur judiciaire dans les 15 jours suivant le jugement, la garantie de l'AGS n'était pas due. (Cass. soc., 20 octobre 2021, pourvoi n° 19-25700).

Santé au travail

Dès lors que le salarié a cessé de transmettre à l’employeur des arrêts de travail et n’a pas répondu à la lettre de la société le mettant en demeure de justifier de son absence, l’employeur, laissé dans l’ignorance de la situation du salarié, n’est pas tenu d’organiser l’examen médical de reprise. (Cass. soc., 4 novembre 2021, pourvoi n° 20-11400).

Requalification du contrat de travail

La durée de la prescription étant déterminée par la nature de la créance invoquée, la demande de rappel de salaire fondée sur la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet est soumise à la prescription triennale prévue par l’article L. 3245-1 du Code du travail. (Cass. soc., 4 novembre 2021, pourvoi n° 19-18908).

François TAQUET, avocat,
Spécialiste en droit du travail et protection sociale