Territoires

Les professionnels de l’immobilier et de l’habitat vent debout quant aux résultats du CNR Logement

Les mesures gouvernementales sur le logement ne font pas l’unanimité, c’est un euphémisme de l’écrire, auprès des professionnels de l’immobilier et de l'habitat. En Moselle, le président de la Fédération BTP, Pierre Schaeffer, dit «regretter que des considérations financières priment sur l’une des priorités des Français : se loger.» Le dossier est sensible, car, comme souvent ce qui est décidé à l’échelon national, aura des répercussions sur l’économie du local, et certainement pas de façon homéopathique.

Acteur majeur de la construction en Moselle, Pierre Schaeffer ne cache pas ses inquiétudes quant au plan logement. © FBTP Moselle.
Acteur majeur de la construction en Moselle, Pierre Schaeffer ne cache pas ses inquiétudes quant au plan logement. © FBTP Moselle.

De nombreux professionnels de l’immobilier et de l’habitat expriment ces dernières heures leur courroux quant aux premières annonces formulées par le gouvernement au terme du Conseil national de la refondation (CNR) sur le logement. Plusieurs organisations patronales montent au créneau – Fédération française du Bâtiment, Fnaim, Fédération des Promoteurs Immobiliers, Pôle Habitat FFB, réseau immobilier Procivis, Union des Syndicat de l'Immobilier (Unis) et Union nationale des Syndicats Français d'Architectes (Unsfa).

PTZ et niche Pinel, pomme de discorde

Leurs représentations locales, dans les territoires, en Moselle notamment sont au diapason. Les mots sont sévères, à la mesure de la déception : «des mesures non chiffrées, ou pas à la hauteur des enjeux, montrent que le secteur n’a pas été entendu, ni sur la crise du logement neuf, ni sur les besoins en matière de rénovation énergétique, ni sur la réalité de la crise du marché immobilier vécu par les Français, singulièrement par les jeunes.» L’objectif des mesures découlant du CNR avaient pourtant beaucoup de vertus annoncées : relancer la construction, favoriser l’accession à la propriété et à la location ou encore de soutenir le logement social. «Les moyens ne suivent pas», assurent les professionnels. Lesquels avaient remis près de 200 propositions à l’exécutif, qui, au final a retenu quelques pistes. La déception des professionnels de l’immobilier et de l’habitat pointe particulièrement deux mesures. D’abord la nouvelle forme du prêt à taux zéro (PTZ). Jusqu’alors, ce dispositif permettait d’aider les particuliers modestes ou intermédiaires à acheter leur résidence principale, qu’il s’agisse d’une maison ou d’un appartement. Pour des raisons budgétaires, il serait désormais réserver aux seuls logements collectifs, pour permettre de loger de manière plus massive. Ce qui, de facto, reviendrait à écarter du PTZ la maison individuelle, quand près de 7 accédants sur 10 optent pour l’achat d’une maison plutôt que d’un appartement. L’autre mesure qui fait discorde est la suppression annoncée de la niche fiscale Pinel, déjà réduite ces dernières années, mais jugée trop coûteuse par l’exécutif. Cette réduction d’impôts, destinée aux particuliers qui investissent dans un logement neuf dans le but de louer prendre fin le 31 décembre prochain. Avec le recentrage du PTZ et la fin de la niche Pinel, le gouvernement entend dégager des économies qui permettraient de financer d’autres mesures du plan, comme les extensions des dispositifs Visale, Logement d’abord ou MaPrimeRenov’.

Faire plus avec peu...

«Sacrifier le seul outil d’accession à la propriété dans le neuf, le Prêt à Taux Zéro, dans plus de 90 % des communes, c’est accroître la fracture entre ceux qui ont les moyens de choisir leur mode d’habiter et ceux qui seront assignées à résidence. Supprimer le Pinel sans alternative, c’est nier le rôle du parc locatif privé pour la mobilité de nombreux Français», argumentent les professionnels. Leur déception tient aussi à des mesures finalement non retenues dans le plan et qu’ils avaient proposés : la création d’un statut fiscal du bailleur privé qui aurait permis aux propriétaires de mieux amortir leurs biens mis en location, un plafonnement des prix de ventes du foncier. L’absence d’incitations destinées aux maires qui délivreraient de nouveaux permis de construire dans leurs communes est également regrettée. Sur des sujets sensibles comme la fiscalité des meublés touristiques de type Airbnb, parfois jugée trop faible et accusée d’aggraver la crise, l’exécutif dit «vouloir ouvrir de grands chantiers.» Les professionnels voient enfin comme un élément très négatif «que rien ne soit prévu en soutien des travaux de rénovation énergétique, après que 48 Mds€ de plus par an avaient été annoncés pour répondre aux objectifs.» Pour eux, «la montagne a accouché d’une souris.» La quadrature n’est pas aisée à trouver, dans un pays alourdie par une dette pachydermique de quelque 3 000 Mds€, soit un accroissement de quelque 3 000 € par seconde, 235 000 € par jour. Soit un endettement à 112 % de notre PIB. Le mois dernier, Gabriel Attal, le ministre des Comptes publics, avait averti que le ministère du Logement «serait très sollicité pour faire des économies dans le budget 2024.» On en est là...

«Le département de la Moselle n’échappe pas à la crise du logement qui s’annonce sévère. Depuis un an, la construction neuve est en repli, tant pour la promotion immobilière que pour la construction de maisons individuelles. Les permis de construire pour les logements régressent de 22 % sur une année glissante. Les perspectives s’annoncent encore plus mauvaises avec des réservations en retrait de 30 %. Face à cette situation, la Fédération française du Bâtiment, accompagnée des 5 autres organisations professionnelles du secteur du logement, est consternée par les dernières annonces du gouvernement. C’est tout un secteur qui est méprisé. On peut regretter que les considérations financières priment sur l’une des priorités des Français : se loger», explique Pierre Schaeffer, président de la Fédération BTP Moselle.