Conjoncture

Les intentions d’embauches en Moselle face à une nouvelle donne...

À l’échelle de la Moselle, la 22e enquête de Pôle emploi Besoin de main-d'œuvre (BMO) confirme les difficultés à recruter dans de nombreux métiers, mais laisse aussi transparaître un changement de paradigme sociétal quant à la place et au sens du travail dans notre vivre ensemble. Dans un contexte où se profile France Travail, dans quelques mois.


1 660 intentions d'embauches ont été déposées pour le métier d'agent d'entretien de locaux par les employeurs en Moselle : le plus recherché en 2023.
1 660 intentions d'embauches ont été déposées pour le métier d'agent d'entretien de locaux par les employeurs en Moselle : le plus recherché en 2023.

Agents d’entretien de locaux, aides à domicile et ménagères, employés libre-service, aides-soignants, aides et apprentis de cuisine et employés de la restauration, serveurs de cafés restaurants : voilà le quintet des intentions d’embauches pour 2023, selon le baromètre Besoin de main-d’œuvre (BMO) de Pôle emploi en Moselle. Les métiers précités représentent une unité de 7 280 projets de recrutement sur les 30 400 tous secteurs, soit 24 % de la totalité des intentions d’embauches. Lesquelles sont en baisse de - 6,41 % par rapport à 2022 dans le département. Assurément, les difficultés de recrutement apparaissent au grand jour. À des degrés variés, elles perdurent sur nos territoires. Par bassin d’emploi, 14 850 intentions d’embauches ont été exprimées par les employeurs sur le périmètre messin, 7 630 sur le bassin houiller, 5 710 sur le bassin sidérurgique et 2 210 dans l’espace géographique de Sarrebourg.

Travailler en 2023...

Si les carnets de commandes peuvent être remplis, si les employeurs tentent de rendre leurs postes à pourvoir les plus attractifs possibles, l’écueil demeure : les entreprises mosellanes peinent à recruter. C’est valable pour les secteurs traditionnellement en manque de main-d’œuvre que sont le bâtiment et les travaux publics, l’hôtellerie restauration, l’automobile et la mécanique ou les services à la personne. Mais, au regard du BMO 2023, le champ des métiers en tension semble s’étendre aux infirmiers, kinésithérapeutes, pharmaciens, attachés commerciaux, télévendeurs, conducteurs routiers, livreurs courte distance, agents de sécurité, éducateurs spécialisés… Liste non exhaustive. La question de l’employabilité revient ici en force, comme l’adéquation entre offre et demande. Il est aussi, certainement, un fait sociétal qu’il est difficile de mesurer dans les statistiques. Plus qu’un déplacement de paradigme, une mutation profonde. Pléthore de salariés ont brainstormé durant la période Covid, notamment durant les confinements. Est sortie de cette réflexion une intense introspection sociétale, individuelle et collective, sur le sens du travail dans nos vies, le sens que l’on lui donne. Nombre de collaborateurs se sont alors détournés de leurs métiers classiques, allant voir d’autres horizons professionnels, ou se lançant dans l’entrepreneuriat. Tout cela se ressent forcément sur les candidatures qui parviennent aux entreprises. Dans de nombreux cas, il n’y en a tout simplement pas. Le défi est là pour les employeurs face à cette carence : composer avec les quelques postulants au profil inadaptés, recruter autrement et de façon plus diverse et large.

France Travail se profile

Face à ce marathon, sans doute, beaucoup de chefs d’entreprise renoncent purement et simplement à embaucher. Au même titre que Pôle emploi était née de la fusion en 2009 entre l'ANPE (la recherche d'emploi) et les Assedic (le versement des allocations chômage), France Travail pousse encore plus loin l'intégration. S'il ne s'agira pas d'une méga-fusion de services comme celle de 2009, il s'agira en revanche de faire travailler ensemble les services de l'emploi (Pôle emploi, Missions locales...) et ceux en charge des prestations sociales (départements, associations, partenaires sociaux...). L'idée étant de reconnecter la prestation sociale avec l'insertion professionnelle. Cela commencera par l'inscription automatique des bénéficiaires du RSA à Pôle emploi, ce qui est loin d'être le cas aujourd'hui. Un diagnostic sera alors fait avec le demandeur d'emploi qui n'aura alors plus qu'un seul référent France Travail qui suivra son parcours tant au niveau de l'insertion que des prestations sociales. Avec un système de sanctions plus progressif et qui concernera les différents aspects du suivi. Il signera un contrat d'engagement unique alors qu'aujourd'hui il y en a quatre qui sont proposés selon l'organisme (CER pour le RSA, PACEA pour les Missions locales, PPAE pour Pôle emploi...). Les bénéficiaires du RSA de longue durée se verront alors proposer les 15 à 20 heures d'activité. Pour l'entreprise aussi il n'y aura plus qu'un seul interlocuteur : France Travail qui orientera le recruteur vers les divers profils (des jeunes en Mission locale, des chômeurs à Pôle emploi ou des éloignés de l'emploi au RSA). Les différents dispositifs de formation préalables seront eux aussi fusionnés. Alors qu'aujourd'hui une vingtaine de comités pilotent ces dispositifs d'insertion et de prestation, France Travail sera articulé autour de quatre directions au niveau national, régional, départemental et du bassin de vie. Une nouvelle organisation qui va requérir d'importants investissements dans les outils d'information numériques pour faire dialoguer ensemble ces différents services ainsi que dans la formation des 100 000 conseillers impliqués. Au total le budget de France Travail s’élèvera à environ 2,5 Mds€ d'ici 2026. Avec cette ambition qui revient comme un serpent de mer depuis des décennies, et à laquelle notre pays semblait avoir renoncé : le plein emploi.

63,7 %  
C'est le taux de difficulté à pourvoir les postes proposés en Moselle en 2023, selon le BMO de Pôle emploi.