Tourisme de mémoire

En Moselle, pour que la flamme de la mémoire ne s’éteigne jamais...

À l’occasion de la commémoration de la signature de l’armistice du 11 novembre 1918, au regard du contexte géopolitique actuel, de la résurgence d’idéologies qu’on aurait tort de banaliser, il apparaît de plus en plus indispensable de mieux connaître l’Histoire. De tirer les précieux enseignements du passé, pour que «cela ne revienne jamais». Si la Moselle a très fortement été impactée par Seconde Guerre mondiale et en porte de nombreux stigmates, la Grande Guerre de 14/18 a, elle aussi, marqué les terres et les esprits. Forts, nécropoles et même jardins : plusieurs lieux sont à visiter ce samedi 11 novembre 2023. Le tourisme de mémoire sert à ne pas oublier. Plus que jamais, le devoir du souvenir se conjugue avec celui de la vigilance.

À Scy-Chazelles, la maison de Robert Schuman est ouverte au public depuis 2009, une passerelle temporelle entre guerre et paix. © CD 57.
À Scy-Chazelles, la maison de Robert Schuman est ouverte au public depuis 2009, une passerelle temporelle entre guerre et paix. © CD 57.

À la découverte des «Festen»

Au lendemain de la guerre de 1870, la Moselle est annexée par les Allemands. Craignant que les Français ne veuillent récupérer leurs terres, ces derniers édifient, dès 1896, une ceinture fortifiée en périphérie de Metz et de Thionville. Ces monuments sont répartis en groupes fortifiés appelés «Festen». De leur construction à la fin de la Seconde Guerre mondiale, ils sont tantôt aux mains des Allemands, tantôt aux mains des Français. En témoignent des équipements de la vie quotidienne qui traduisent les coutumes de l’un ou l’autre pays. Près de Verny, le fort Wagner est une «Feste» allemande, construite entre 1904 et 1910 : sept bâtiments répartis sur 47 hectares, reliés par 1,5 km de souterrains, offrant un certain confort – pour une construction militaire - et surtout pourvus des dernières innovations en matière de technologie. Durant la période hivernale, il est possible d’organiser des visites de groupes sur réservation. www.le-fort-wagner.com. Le fort de Guentrange, quant à lui, a été édifié par les Allemands entre 1899 et 1906, toujours à des fins de protection d’un éventuel désir des Français de regagner la Moselle. Il a été largement amélioré entre 1912 et 1916, et pouvait également se vanter de faire partie des bâtiments les mieux équipés de la «Moselstellung» («position de la Moselle», littéralement). Devenu possession française après l’armistice de la Première Guerre mondiale, il est intégré à la Ligne Maginot en 1930. L’armée américaine en détruira les canons lors de la Libération. Une association, baptisée «Fort de Guentrange» a été créée en 1985 afin de restaurer et valoriser le site. Le Fort de Guentrange est ouvert le 11 novembre 2023 de 10 h à 16 h, dernière visite à 14 h. http://fort.guentrange.free.fr.

Dans le Saulnois, sur les traces de la Première Guerre mondiale

La Moselle a connu des heures douloureuses durant la Grande Guerre. Territoire qui attise les convoitises, épicentre des ressentiments patriotiques, le département est sous domination allemande, quand ces derniers déclarent la guerre à la France. La Moselle, sous occupation allemande, est alors la zone la plus militarisée au monde. Tant et si bien que le 20 août 1914, les troupes françaises se retrouvent en grande difficulté lors de la Bataille de Morhange. Les affrontements sont sanglants, plus de 8 000 soldats y laissent leur vie. La loi française du 29 décembre 1915 décrète la création de nécropoles nationales pour y entreposer les corps des combattants «Morts pour la France», dans des sépultures perpétuelles, entretenues par l’État. On trouve dans le Saulnois onze nécropoles nationales : Bréhain, Château-Bréhain, Chicourt, Cutting, Dieuze, Conthil, Frémery, Lagarde, Lidrezing, Riche et Vergaville. À Riche se trouve la plus grande nécropole nationale in situ de la Bataille des Frontières : 2 574 Français y reposent, au pied d’une stèle en grés de Saverne. Cette nécropole vient d’être classée au Patrimoine de l’Unesco. À Morhange a été édifié un Monument du souvenir, impressionnant obélisque en granit bleu, en mémoire des soldats français tombés durant la bataille de Morhange les 19 et 20 mai 1914. Construit entre les deux guerres, il a été détruit en 1940 par les Allemands, puis reconstruit à leurs frais en 1964. Une table d’orientation jouxte l’obélisque : elle surplombe les anciens champs de bataille et donne à voir un aperçu de ce qui s’y est déroulé. www.tourisme-saulnois.com.

Sarrebourg, l’hommage aux prisonniers de guerre : un site classé au patrimoine mondial de l’Unesco depuis le 20 septembre 2023

Créée en 1922, la Nécropole nationale de Sarrebourg a été aménagée jusqu’en 1926, afin de regrouper les corps des soldats morts au cours de leur captivité en Allemagne durant la Grande Guerre. Inhumés dans des cimetières provisoires rattachés aux camps d’internement, leurs corps ont été exhumés puis rapatriés en ces lieux. Sur ce site, il est également possible de se recueillir devant une œuvre du sculpteur Fredy Stoll, qui, durant sa captivité, a réalisé cette statue, à partir d’un bloc de granit. Ce monument a été restitué à la France le 14 juin 1928. www.tourisme-sarrebourg.fr.

La Moselle, là où s’est écrit la paix au lendemain de la guerre

Si ne pas oublier les heures douloureuses qu’a connues la Moselle est fondamental, il est tout aussi impératif de connaître celles et ceux qui ont travaillé pour la paix, afin que de telles horreurs ne se produisent plus. À proximité de Metz se trouve la maison où a vécu Robert Schuman, qui a joué un rôle prépondérant au lendemain de la Seconde Guerre mondiale : créer une Europe unifiée afin de souder notamment les liens franco-allemands et éviter une nouvelle escalade de la violence. «La paix mondiale ne saurait être sauvegardée sans des efforts créateurs à la mesure des dangers qui la menacent. La contribution qu’une Europe organisée et vivante peut apporter à la civilisation est indispensable au maintien des relations pacifiques», déclarait Robert Schuman le 9 mai 1950 dans sa maison de Scy-Chazelles. Père fondateur de l’Europe, le conseiller général et député de la Moselle, fut également président du Conseil (1947), puis ministre des Affaires Étrangères (1948-1952). On lui doit la plupart des traités fondamentaux signés après la Seconde Guerre mondiale. La Maison de Robert Schuman est ouverte au public depuis 2009 : les visiteurs sont invités à y découvrir les débuts de la construction européenne - destinée à faire perdurer la paix - au moyen d’un espace muséographique interactif. Ludique et instructif pour quiconque s’intéresse à l’histoire de l’Europe depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours, ce lieu ravira également les férus d’architecture et de nature, grâce notamment à son superbe jardin et potager qui surplombe la vallée de la Moselle. La sépulture de Robert Schuman repose dans la Chapelle fortifiée du XIIe siècle attenante à la maison. www.mosellepassion.fr.

Sublimer la paix sur les vestiges de la guerre.

À Bitche, au pied de la Citadelle, se trouve le très beau Jardin pour la Paix. Construit sur une ancienne esplanade, autrefois dédiée à la culture militaire, il porte en son nom une de ses vocations premières : réconcilier le passé avec le présent et faire fleurir la paix au travers du partage et de la biodiversité au pied d’un site jadis marqué par les guerres et les antagonismes. www.citadelle-bitche.com.

Moselle, sept sites funéraires de la Grande Guerre inscrits au Patrimoine de l’UNESCO

Le 25 septembre 2023, l’UNESCO a dévoilé une liste de 42 nouveaux sites inscrits à son patrimoine, avec une attention toute particulière portée aux sites de mémoire de la Première Guerre mondiale, notamment dans la Meuse, à Verdun. Avec cette volonté manifeste de donner à ces lieux une portée universelle et de reconnaître leur contribution aux processus de paix. Sept sites mosellans ont ainsi reçu cette distinction honorifique : la nécropole nationale de Riche, le cimetière militaire allemand de l’Hellenwald, la nécropole nationale française de l’Espérance, le cimetière national français de prisonniers de guerre de Sarrebourg, la nécropole nationale française de Chambières, la nécropole nationale française de Lagarde, le cimetière allemand de Lagarde.

Pour aller plus loin : https://www.mosl.fr/fr/decouvrir-la-moselle/destination/sejour/guides-brochures