SOCIAL La difficile reconnaissance du burn-out

Le burn-out, syndrome d’épuisement professionnel, n’est pas vraiment pris en compte par la branche accidents du travail de la Sécurité Sociale.
Le burn-out, syndrome d’épuisement professionnel, n’est pas vraiment pris en compte par la branche accidents du travail de la Sécurité Sociale.

Le burn-out, syndrome d’épuisement professionnel, n’est pas vraiment pris en compte par la branche accidents du travail de la Sécurité Sociale.

Phénomène largement diffus dans le monde du travail, le burn-out n’est que très marginalement reconnu par la sécurité sociale. Un chantier complexe qui attendra le prochain gouvernement.

Le burn-out, syndrome d’épuisement professionnel, n’est pas vraiment pris en compte par la branche accidents du travail de la Sécurité Sociale. Et ce n’est pas demain la veille… Le 15 février dernier, à Paris, la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale rendait publiques les conclusions de son rapport sur «l’épuisement professionnel (ou burn out), une réalité en mal de reconnaissance». Le phénomène touche tous les secteurs et tous les types de professionnels, explique le document. D’après Santé publique France, l’agence nationale de santé publique, ce sont 30 000 personnes qui ont été touchées entre 2007 et 2012. Quant à une étude de 2014 du cabinet Technologia, elle évalue à 3,2 millions de salariés, soit 12 % de la population active, le nombre de personnes à risque. Difficile, donc, de mesurer l’ampleur du burn-out. Quoi qu’il en soit, «il fait des victimes par dizaines, par centaines de milliers», tranche Gérard Sebaoun (PS), rapporteur de la mission d’information. À l’origine, le rapport pointe une transformation du monde du travail, initiée dans les années 80, faite notamment de nouvelles méthodes d’organisation du travail et de management, qui, mixées à l’impact de la numérisation, ont engendré une intensification du travail et une augmentation de la souffrance psychique. À l’extrême, la multiplication des suicides, comme chez France Télécom, à partir de 2008, ont alerté l’opinion publique sur ce phénomène. Une dizaine d’années plus tard, le burn-out n’est toujours pas pris en compte par la Sécurité Sociale. L’an dernier, c’est en vain que des députés ont tenté d’inscrire le burn-out comme maladie professionnelle, dans le cadre du projet de loi El Khomri. Et suite à cet échec, le bureau de la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale a créé la mission d’information qui a produit ce rapport. Lequel pointe une difficulté majeure : la difficulté de donner une définition précise au terme de burn-out. Issu des travaux de la recherche en psychiatrie dans les années 70, il recouvre un ensemble de symptômes (épuisement, tristesse inexpliquée, comportement apathique, troubles du sommeil, difficulté à assumer des charges professionnelles, isolement…) dus à une situation professionnelle, qui permettent au médecin d’établir son diagnostic, comme une dépression ou une maladie somatique.

Objet difficile à définir…

Conséquence de cette situation, en France, les salariés ont le plus grand mal à faire reconnaître le burn-out comme une maladie professionnelle : en 2015, seuls 418 cas de «maladies psychiques liées au travail» ont été reconnus comme maladie professionnelle et ont donc déclenché une prise en charge à 100 % des soins, en plus d’une rente, en fonction du taux d’incapacité permanente partielle (IPP). Ce très faible nombre de cas découle du fait que le burn-out n’est pas inscrit dans les tableaux des maladies professionnelles annexé au code de la Sécurité Sociale. Ceux-ci listent les maladies prises en charge dans le cadre du régime général. Mais l’inscription du burn-out se heurte à la difficulté de fixer une liste de travaux susceptibles de le provoquer. Résultat, sa reconnaissance comme maladie professionnelle passe en général par le biais des 26 commissions régionales de reconnaissance des maladies professionnelles, (CRRMP) aptes à reconnaître les maladies professionnelles, par l’examen des dossiers individuels. Une démarche qui suppose que le patient soit frappé d’un taux d’IPP d’au moins 25 %, rarement atteint dans le cas des pathologie psychiques. C’est à ce titre que la mission d’information préconise, d’une part, de renforcer les effectifs des CRRMP et, d’autre part, de diminuer – voire d’éliminer – ce taux d’IPP nécessaire à l’ouverture d’un dossier, dans le cadre d’une expérimentation. Autre préconisation, la création d’un Centre national de référence sur le burn-out, ainsi qu’un «décloisonnement des travaux et des plans des différents ministères», ajoute le député Yves Censi (LR), président de la mission d’information. Par ailleurs, actuellement, quelque 200 médecins sont poursuivis devant la justice par des employeurs pour avoir expliqué dans leur diagnostic que la santé des salariés s’était dégradée en raison de leurs conditions de travail. Pour éviter ces contentieux, les deux députés proposent de modifier le code de déontologie de la profession, octroyant la possibilité d’établir ce lien de cause à effet entre maladie et conditions de travail aux seuls médecins du travail. Une mesure qui passe nécessairement par le vote d’une loi. Or, «la législature se termine. Ce rapport est un objet de travail pour la suite», reconnaît Gérard Sebaoun. Au Danemark, une pathologie psychique a été incluse dans la liste de maladies professionnelles dès 2005.