Les banques européennes dans la tourmente

Les banques européennes sont aujourd’hui dans la tourmente.
Les banques européennes sont aujourd’hui dans la tourmente.

Les banques européennes sont aujourd’hui dans la tourmente.

Marges laminées par les taux d’intérêt très bas, excès de créances douteuses et litigieuses dans leur bilan, doutes sur leur réelle solidité : les banques européennes sont, depuis quelques mois, dans la tourmente…
Les raisons de douter de la solidité du système bancaire européen étaient déjà nombreuses, mais le dernier rapport semestriel du FMI, publié début octobre, sur la stabilité financière est venu jeter de l’huile sur le feu en rappelant le triptyque infernal auquel les banques européennes doivent faire face : excès de créances douteuses, nombre élevé d’agences bancaires pas toujours rentables et marges en baisse en raison des taux d’intérêt très faibles. Enfin, le Brexit a montré la défiance qu’inspirait le secteur bancaire européen aux investisseurs, puisque les cours bancaires se sont effondrés de concert sur la plupart des places financières mondiales à la fin du mois de juin. La part dans les bilans bancaires des créances douteuses et litigieuses, c’està-dire celles dont le débiteur n’a pas versé les intérêts et les remboursements depuis au moins 90 jours, atteint désormais 18 % en Italie, 12 % au Portugal et 34 % en Grèce. Un niveau amplement suffisant pour que les petits problèmes nationaux des banques deviennent très vite un problème pour l’ensemble du système bancaire de la zone euro. Voilà certainement pourquoi d’aucuns préfèrent parler de prêts non performant pour désigner par un euphémisme franglais une réalité effrayante… Peu nombreux sont pourtant ceux qui se souviennent que le Portugal avait obtenu un plan d’aide de l’Union européenne et du FMI en 2012, justement pour sauver ses banques ! Mais au-delà du volume colossal de créances douteuses dans certains pays (360 milliards d’euros pour l’Italie), c’est surtout leur part non provisionnée qui inquiète. Et le moins que l’on puisse dire est que l’Italie fait face à un problème d’envergure, puisque les estimations conduisent à un besoin de recapitalisation de ses banques entre 80 et 100 milliards d’euros ! Le plus grave est que l’augmentation des créances douteuses en Italie ne résulte pas d’une bulle immobilière comme en Espagne, mais bien de la stagnation économique.
Débuts de l’Union bancaire européenne
Selon les nouvelles règles de l’Union bancaire européenne, entrées en vigueur le 1er janvier 2016, lorsqu’une banque est en faillite, les premiers appelés à la renflouer sont les actionnaires et les prêteurs, qui devront couvrir au minimum 8 % des pertes de la banque. Si cela ne suffit pas, il sera alors possible de faire appel à des fonds nationaux de résolution abondés par le secteur bancaire. Enfin, les ménages et les PME seront partiellement protégés, puisqu’il a été confirmé que leurs dépôts seront garantis à hauteur de 100 000 euros. Mais au-delà de 100 000 euros… Le sauvetage des banques italiennes constituera donc un test pour la nouvelle Union bancaire européenne. Et ce, d’autant plus que, prises en étau entre les nouvelles obligations prudentielles et des taux de marge d’intérêt très bas ( le tout mâtiné de prises de risques pas toujours maîtrisées), les banques voient leur rentabilité s’effondrer dans quasiment tous les pays. Alors, certes les banques (en particulier françaises) sont censées être plus sûres qu’avant la crise de 2008, c’est du moins la conclusion du FMI et des stress tests conduits sous l’égide de l’Autorité bancaire européenne (ABE), mais c’est oublier un peu vite l’existence de risques systémiques encore mal pris en compte.
Le cas Deutsche Bank
Le cas de la Deutsche Bank, la plus importante banque privée allemande, est quant à lui très particulier, ne serait-ce qu’en raison des innombrables scandales et problèmes dans lesquels elle est engluée. Ces déboires ne seraient au fond que le problème du gouvernement allemand, si la banque ne venait d’être classée par le FMI comme l’une des plus dangereuses pour le système financier mondial. En effet, la faillite d’un tel géant, contrepartie dans tant d’opérations financières et dont le total de bilan représente, plus ou moins, le PIB de l’Italie, aurait des conséquences incalculables.«Too big to fail»… Dès lors, pour éviter un nouveau Lehman Brothers, le gouvernement d’Angela Merkel préparerait un plan d’urgence, d’autant que Deutsche Bank est désormais dans le collimateur des autorités américaines pour son rôle dans la crise des subprimes. Mais quelle que soit la solution retenue (entrée de grands groupes allemands au capital de la banque, vente de la division gestion d’actifs, intervention du Qatar, déjà actionnaire à hauteur de 10 % de la banque), l’augmentation de capital semble incontournable et le gouvernement allemand aura son rôle à jouer, lui qui avait pourtant refusé que l’UE vienne,au secours des banques grecques l’année dernière…
raphaël.didier