Management
La culture d’entreprise, socle du développement
Entre collaborateurs en quête de sens, consommateurs privilégiant les entreprises authentiques et montée en puissance des fonds ISR (Investissement socialement responsable), la culture d’entreprise a pris une place prépondérante. Patrick Vignaud de B-Harmonist donne des clés pour en faire un levier concret de business et de performance.

« Pour construire une grande entreprise, il faut d’abord développer une culture d’entreprise », déclare Octave Klaba, dirigeant d’OVH, entreprise spécialisée dans le cloud computing. La culture d’entreprise, c’est la façon unique de se comporter et de réagir ; pourquoi et comment on fait les choses « ici ». C’est répondre à la question « What », soit définir son métier et sa proposition de valeur. « Why », pourquoi on fait les choses, quel sens je veux donner à mon entreprise pour permettre aux salariés d’être énergisés par une vision et une raison d’être inspirantes. « Where » : quelle route je veux emprunter pour être aligné sur la stratégie et les objectifs. Et enfin « how », ou comment, à savoir quels rituels ou valeurs guident les comportements et l’organisation de l’entreprise.
Elément
de dynamique collective
Pour
que cela marche, « il
faut être cohérent et aligné avec sa culture d’entreprise »,
signale d’emblée Patrick Vignaud,
Managing Partner de B-Harmonist, société
de coaching et de conseil qui œuvre, depuis 2012, pour aider les
entreprises à expliciter leur culture d'entreprise et en faire un
outil opérationnel de performance.
La
culture
d’entreprise,
ce
sont les fondamentaux qui
permettent aux collaborateurs d’être alignés
et autonomes. Elle constitue un cadre commun clair, un projet pour
leur indiquer où l’entreprise va
et les lancer sur une dynamique collective. Avoir une culture
d’entreprise favorise la cohésion, la
dynamique d’équipe- elle permet
de
diminuer les éventuelles tensions-,
l’alignement et l’autonomie. « A
l’image d’un jeu d’échecs où les règles du jeu sont résumées
sur une page mais où la liberté et la créativité laissée aux
joueurs est immense »,
commente Patrick Vignaud. « C’est
un ensemble d’éléments qui font que les collaborateurs ont envie
de se lever le matin et que les clients font confiance à
l’entreprise… », conclut
Octave Klaba. « Avoir une
culture d’entreprise permet aux collaborateurs de réfléchir comme
un fondateur et de prendre la bonne décision au jour le jour »,
résume Kevin
Duchier, DRH de Germinal.
Elément
d’attraction et de fidélisation des talents
C’est
d’autant plus important pour intégrer de nouveaux collaborateurs.
« S’ils perçoivent des
messages clairs et cohérents, ils pourront être autonomes
rapidement. Si tel n’est pas le cas, ils seront au contraire
découragés et auront envie de partir »,
alerte Patrick Vignaud. Pourtant, dans
les années 1980-90, « la
culture d’entreprise était tombée dans l’oubli , avec des
discours ‘paillettes’ des publicitaires et une faible résonance
du côté de l’écosystème autour du sujet »,
regrette Patrick Vignaud. Alors qu’elle
est le socle qui permet à une
entreprise de se développer. Un socle,
à la fois pour les collaborateurs,
et pour les futurs collaborateurs.
L’entreprise
doit utiliser sa culture comme référentiel au quotidien dans ses
process de recrutement, dans sa présentation et sa différenciation.
Elle
peut servir de filtre pour recruter. « Les
RH peuvent l’utiliser pour sélectionner ceux qui adhèrent au
projet et sont compatibles avec la culture. Tous les candidats
doivent savoir qui vous êtes et quelles sont vos convictions »,
explique Patrick Vignaud.
Renforcer
sa culture permet à la fois d’accroître
l’attraction et la fidélisation des talents et l’engagement des
collaborateurs. « Pour
recruter et fidéliser les jeunes, RH et managers mettent la pression
aux chefs d’entreprise pour pouvoir communiquer sur une culture
d’entreprise forte, authentique et sincère, et pas seulement sur
un discours de façade. En outre, les collaborateurs sont devenus des
consom’acteurs, ils recherchent des entreprises authentiques à
impact et demandent des comptes en matière de RSE. Il ne s’agit
plus de donner du sens mais d’avoir du sens »,
commente Patrick Vignaud. Les
investisseurs sont eux aussi de plus en plus sensibles à la raison
d’être des entreprises et demandent le respect d’engagements
RSE.
Elément
clé de la santé de l’entreprise
Adopter
une culture d’entreprise doit être un chantier prioritaire pour
les entreprises, d’autant plus en temps de crise, qui agit comme un
révélateur :
elle
a un effet de
loupe
sur les dysfonctionnements et les comportements des collaborateurs.
Même à distance cela est possible. L’entreprise doit d’abord
réaliser
un sondage
pour
mesurer
concrètement la
clarté et la force de sa culture, évaluer l’alignement et voir
s’il existent
des écarts
de perception importants
entre les dirigeants et les collaborateurs, identifier et prioriser
les leviers
de progression.
«C’est
le bon moment pour entreprendre un chantier sur la culture car les
collaborateurs y sont particulièrement sensibles en période de
crise »,
juge Patrick Vignaud. La
culture agit comme « un
anticorps » ;
c’est
un élément clé de la santé de l’entreprise. Ainsi, plus elle
est forte, plus l’entreprise aura un système immunitaire
performant qui lui permettra de surmonter la crise. »
Et
lorsque l’entreprise est challengée, les collaborateurs qui sont
en phase vont se souder et trouver des solutions pour sortir de la
crise. Suite
à l’acquisition d’une entreprise aux Etats-Unis, OVH
a connu un choc de cultures et des tensions entre les anciens et
nouveaux collaborateurs, qui a abouti à une vague de départs. « Au
bout de quatre
mois de travaux nous nous sommes alignés sur l’ambition de
l’entreprise, sur sa raison d’être, ses missions et ses valeurs.
Nous avons notamment décliné les comportements qu’on veut voir,
mais aussi les comportements qu’on ne veut absolument pas voir chez
OVH »,
expliquait Octave Klaba sur le blog d’OVH. « Pour
lui permettre de recréer une énergie commune sur sa vision, de
retrouver un second souffle et de réengager ses équipes,
l’entreprise,
créé
en 1999, s’est obligée à transcrire par écrit sa culture
d’entreprise, après 19 ans d’existence »,
relate Patrick Vignaud. Une entreprise a ainsi tout intérêt à
formaliser sa culture dans un culture book, un vade mecum ou sous
forme digitale.
Charlotte DE SAINTIGNON