Hervé Bauduin, président de l’UIMM Lorraine : «L’après sera long, très long…»

«L’urgence aujourd’hui, c’est l’instant !», assure Hervé Bauduin, le président de l’UIMM Lorraine.
«L’urgence aujourd’hui, c’est l’instant !», assure Hervé Bauduin, le président de l’UIMM Lorraine.

Si aujourd’hui l’urgence demeure la lutte contre la prolifération du Covid-19, il n’en demeure pas moins que la gestion de l’après et l’anticipation d’un redémarrage s’affichent plus que nécessaires. Un message délicat qu’Hervé Bauduin, le président de l’UIMM (Union des industries et métiers de la métallurgie) Lorraine entend faire passer dans un climat extrêmement difficile.

La Gazette Moselle : L’urgence est aujourd’hui consacrée à la lutte contre l’épidémie de Covid-19 mais cette crise sanitaire s’additionne actuellement à une véritable crise économique. Comment appréhendez-vous le fait que bon nombre d’entreprises, notamment dans le secteur industriel, ont arrêté leur activité ?

Hervé Bauduin : L’urgence aujourd’hui, c’est l’instant ! Il est indispensable de nous concentrer sur la lutte contre l’épidémie. Il ne peut y avoir d’autres priorités à court terme. Il n’en demeure pas moins que l’on ne peut tout stopper. Quand on arrive à maintenir une activité réduite, nous savons tous qu’il est plus facile de redémarrer. Il est certain qu’actuellement les chefs d’entreprise sont partagés entre la peur pour eux-mêmes ainsi que pour leurs collaborateurs et la perception de l’après.

L’arrêt d’activité est-elle parfois la seule solution possible ?

Je l’entends bien mais il nous faut mettre en œuvre une nouvelle façon de travailler en préservant à la fois notre santé et notre avenir. Si nos entreprises ferment complètement, demain il y aura en Lorraine, 10, 20, 30 000 chômeurs de plus. Il y aura un bout du tunnel, il existe. Quand il sera arrivé, bon nombre d’entreprises ne rouvriront pas car leurs commandes, leurs marchés se seront déplacés dans d’autres régions, dans d’autres pays. Je ne veux pas ajouter de l’anxiété à l’anxiété mais la violence de la crise sanitaire que nous rencontrons et ses ravages humains ne doivent pas nous empêcher de voir plus loin. Il y aura un «après» qui lui sera long, très long.

Vous lancez un appel pour parvenir à faire face à l’urgence actuelle et à l’anticipation de l’après ?

À l’UIMM Lorraine, nous lançons un appel à tous, quels que soient leur emploi et leur place dans les entreprises industrielles. Avec calme et lucidité, il faut construire encore pour quelques semaines une nouvelle façon de travailler ensemble en préservant à la fois notre santé, ce qui est la priorité absolue, et notre avenir. Aujourd’hui, des millions de femmes et d’hommes en France continuent de travailler pour nous soigner, nous protéger, nous nourrir, nous garantir l’eau, l’électricité, le gaz, le ramassage des ordures. Il est nécessaire que les chaînes d’approvisionnement ne s’arrêtent pas, c’est vital pour notre pays et pour chaque citoyen. Il n’y a pas que notre intérêt personnel à continuer d’alimenter la chaîne de production, il y a l’intérêt général, c’est-à-dire penser aux autres. Si nous arrêtons de produire totalement, des maillons vont manquer à la chaîne qui s’effondrera et ce ne sera pas pour quelques semaines.

Il faudra bien tirer des enseignements, des conclusions sur cette crise inédite ?

L’heure n’est pas aux polémiques même si certains sèment déjà un rapport de force et d’égoïsme. Nous devons être unis. Le seul maître-mot est : la solidarité. Naturellement, il y aura des enseignements à tirer et voir comment appréhender ce fameux après. Des choses évolueront et le redémarrage ne pourra se faire qu’avec trois espaces bien présents : l’Europe, le niveau national et surtout régional.

Propos recueillis par Emmanuel VARRIER