Actualité - Opinion

France 2030 : un nouveau plan d’investissement

Alors que les 100 milliards d’euros du plan de relance ne sont pas encore totalement dépensés, le président de la République a annoncé un nouveau plan d’investissement pour la rentrée, concentré sur des filières industrielles d’avenir…

Lors de son allocution du 12 juillet dernier, Emmanuel Macron n’a pas seulement annoncé la mise en place d’un passe sanitaire, mais également un nouveau plan d’investissement dont l’objectif est de «bâtir la France de 2030 et faire émerger dans notre pays et en Europe les champions de demain.» La déclaration n’a pas manqué de surprendre, dans la mesure où le précédent plan (de relance) de 100 milliards d’euros sur deux ans devait lui aussi préparer la France pour 2030 ! De là à en déduire que le premier plan n’était pas suffisamment ambitieux ou que le deuxième n’est qu’une annonce politique de précampagne électorale, il n’y a qu’un pas…

Des contours flous

Alors qu’à peine plus de 50 % des fonds du plan de relance ont été dépensés, il est question d’un nouveau plan de 20 à 30 milliards d’euros sur cinq ans. Au vu des taux d’intérêt très bas, certains économistes - dont Olivier Blanchard et Jean Pisani-Ferry - plaidaient même pour 50 milliards d’euros. Mais, à quelques encablures des élections présidentielles, la question de la dépense publique va refaire son apparition dans le débat politique, tout comme celle de la dette publique - estimée à près de 120 % du PIB en France. Ce niveau n’est pas un danger en soi, contrairement à une idée reçue, mais peut avoir des conséquences politiques désastreuses lors d’une campagne.

Emmanuel Macron avait déjà listé quelques filières clés comme le numérique, l’industrie verte, les biotechnologies ainsi que l’agriculture. Il semblerait que le nucléaire, l’hydrogène et l’espace y figureront aussi, les filières étant choisies sur la base de l’existence d’un marché porteur, d’une industrie existante et de compétences disponibles. D’après les premières informations, la sélection des investissements se ferait ensuite sur la base, notamment, d’un critère de décarbonation de l’économie. Et, afin d’éviter une approche descendante très souvent reprochée à Emmanuel Macron, les filières industrielles seraient associées à la sélection des projets, ce qui devrait en outre, selon le gouvernement, encourager les entreprises à s’engager dans des activités plus risquées. Ce dernier point est surprenant, dans la mesure où un entrepreneur n’engage que très rarement des fonds sur la base de subsides promis par l’État, mais plutôt sur les anticipations de profitabilité (cf. l’esprit d’entreprise, selon Schumpeter). Et ensuite, pour son développement, une entreprise a besoin de marchés de capitaux développés et de banques suffisamment capitalisées.

En tout état de cause, le nombre de filières évoquées par l’exécutif est important, au point de laisser planer le traditionnel risque français d’un saupoudrage, qui permettrait certes de satisfaire tous les lobbies avant les élections, mais diluerait d’autant les sommes engagées dans chaque filière.

La souveraineté industrielle

Lors de ses déplacements, le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, n’a cessé de vanter le savoir-faire français et les possibilités d’industrialisation des procédés. Qu’il suffise de penser aux déclarations dithyrambiques faites lors de sa visite, le 29 juillet, à l’entreprise Carmat : «ce cœur artificiel va permettre de sauver des dizaines de milliers de vies.» Et d’ajouter : «le sujet clé maintenant, c’est comment on industrialise cette prouesse.» Affichant un tropisme technologique évident, le gouvernement reste persuadé que l’avenir de la France est de devenir leader dans certains secteurs clés et de s’engager dans des innovations de rupture. Mais cet objectif, qui fut peu ou prou celui de tous les gouvernements depuis 30 ans avec le succès que l’on sait, est-il encore plausible eu égard à l’avance incroyable prise par les États-Unis et la Chine ? En outre, en tant que membre de la zone euro, la France se devra de rendre ses objectifs de souveraineté industrielle compatibles avec ceux de ses partenaires. D’où l’idée de s’appuyer sur les projets importants d’intérêt européen commun, qui autorisent les États membres à financer des projets au-delà des limites habituellement fixées par la réglementation européenne. Bruno Le Maire affirme, du reste, que «l’ambition est de retrouver notre indépendance industrielle et technologique» et d’élever en parallèle le niveau de formation des salariés. Ce point est crucial, si l’on en juge par les dernières enquêtes sur le niveau en mathématiques et en sciences des élèves (TIMSS) qui placent la France en queue de peloton…

En fin de compte, peut-être faudrait-il concentrer tous les efforts sur seulement un ou deux secteurs clés, à même d’offrir à la France un véritable avantage concurrentiel, d’autant que le «quoi qu’il en coûte» est désormais terminé.

Raphaël DIDIER


La fin du «quoi qu’il en coûte» actée

La sortie de crise se dessine. Après l’avoir annoncée lors de la Rencontre des entrepreneurs de France (REF) du Medef, le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, a dévoilé, le 30 août, les modalités et le calendrier de la levée des dispositifs de soutien aux entreprises, notamment la suppression du Fonds de solidarité à la fin de ce mois de septembre. Des aides sur mesure, (prise en charge des coûts fixes au 1er octobre) sont recentrées sur les secteurs qui restent fragilisés (restauration, hôtellerie, tourisme,…). Des plans d'actions spécifiques devraient être mis en place pour l'évènementiel, les agences de voyages et les professionnels de la montagne, secteurs où l'activité peine à redémarrer.

B.L