Crise sanitaire : le plan d’urgence du gouvernement pour les start-up

Crise sanitaire : le plan d’urgence du gouvernement pour les start-up

La période de récession économique qui se profile pourrait être fatale à un grand nombre de jeunes pousses. C’est pourquoi le gouvernement a pris plusieurs mesures destinées à soutenir cet écosystème fragile.

Une situation critique. Sauf exceptions (plateformes de rendez-vous médicaux par visioconférence, de vente en ligne de médicaments, de livraison de nourriture…), la plupart des start-up françaises ont vu leur activité chuter, les délais de paiement s’allonger et leur trésorerie fondre, depuis la mise en place des mesures instaurées par la loi d’urgence sanitaire. Et celles qui étaient en train de lancer ou de conclure une levée de fonds ont vu ces opérations interrompues ou reportées.

Un plan de soutien spécifique pour les start-up

Pour limiter la casse, le gouvernement a présenté le 25 mars dernier un vaste plan d’aides destiné spécifiquement aux start-up. Au total, ce dernier se chiffre à près de 4 milliards d’euros. «Un plan de soutien massif qui a assez peu d’équivalent dans le monde», a souligné le secrétaire d’État au Numérique, Cédric O, au cours d’un webinar, organisé le 30 mars dernier par l’association France Digitale, qui réunit les entrepreneurs et investisseurs français du numérique. Ce plan de soutien dédié aux start-up vient ainsi compléter les mesures prises par le gouvernement en faveur de l’ensemble des acteurs économiques (report de charges, chômage partiel, garantie de l’État pour des prêts bancaires…), auxquelles les start-up sont également éligibles.

Des mesures pour préserver la trésorerie

Dans le cadre de ce plan d’aide, l’État va tout d’abord procéder au remboursement accéléré des crédits d’impôt sur les sociétés restituables en 2020, ainsi qu’au versement accéléré du crédit impôt recherche (CIR) et des aides à l’innovation du Programme d’investissements d’avenir. De plus, les start-up peuvent désormais demander à bénéficier de prêts de trésorerie garantis par l’État, d’un montant plafonné à deux fois leur masse salariale en France en 2019 ou 25 % de leur chiffre d’affaires annuel. L’État s’est ainsi engagé à garantir jusqu’à 2 milliards de ces prêts de trésorerie. Toutes les start-up y sont éligibles «indépendamment de leur rentabilité», excepté «celles qui sont en difficulté financière au sens de la définition européenne», a précisé le secrétaire d’État au Numérique. «Les banquiers ont peu l’habitude des start-up et peuvent avoir tendance à privilégier les business qu’ils connaissent déjà», et c’est pourquoi «les start-up sont les seules entreprises pour lesquelles Bpifrance peut faire des prêts en direct, sans passer par les banques». Mais «il faut néanmoins commencer par aller voir votre banque, sinon Bpifrance ne pourra pas s’en sortir…», a-t-il ajouté.

Un French Tech Bridge piloté par la Bpi

Pour les start-up qui avaient lancé ou sur le point de conclure une levée de fonds, une enveloppe de 80 millions d’euros, financée par le Programme d’investissements d’avenir et gérée par Bpifrance, a été constituée pour cofinancer, de préférence aux côtés des investisseurs historiques, des «equity bridges» (les périodes entre deux levées de fonds). «L’idée c’est que, si vous étiez en levée de fonds et qu’elle est interrompue à cause de la crise, Bpi se met autour de la table avec les investisseurs institutionnels et fait du prêt en OC [obligations convertibles] pour vous [les start-up] permettre d’avoir de la visibilité et de reporter la levée», a expliqué Cédric O. «L’objectif de Bpi n’est pas de convertir les OC et de monter en capital, mais de faire en sorte que cela reste un prêt ‘bridge’». Et ce, «avec les investisseurs historiques, parce qu’il me paraît assez sain que ces derniers donnent de la visibilité aux entreprises dans lesquelles ils ont investi» : « l’État fait sa part, mais nous avons aussi demandé aux investisseurs [en capital, ndlr] de faire leur part».

De la théorie à la pratique 

Parmi les questions que soulèvent ces nouvelles mesures figurent notamment les critères d’éligibilité à ces aides réservées aux entreprises innovantes. Mais qu’est-ce qu’une entreprise innovante ? «Il faut avoir reçu une aide à l’innovation dans les cinq dernières années, ou avoir été accélérée ou incubée, dans les cinq dernières années, ou avoir compté dans son capital un VC [venture capitalist], dans les cinq dernières années», a précisé le secrétaire d’État. «Je pense que, grosso modo, cela couvre à peu près toutes les start-up, et si jamais il y a un doute pour les banques, vous pouvez demander à la DGE [Direction générale des entreprises du ministère de l’Économie] une attestation qui dit que vous avez droit à ce prêt de trésorerie garanti par l’État ».

Autre question récurrente : les travailleurs indépendants auxquels font souvent appel les start-up peuvent-ils être pris en compte dans le calcul de la masse salariale ? «Non, à ce stade, on ne peut pas compter les free-lances dans les effectifs, seuls les salariés de la start-up sont concernés», a répondu Cédric O. «On s’est battu pour que les autoentrepreneurs soient pris en compte dans le Fonds de solidarité destiné aux indépendants» et «on ne peut pas faire une exception pour les start-up sur un statut qui concerne, par ailleurs, énormément d’indépendants et de professions libérales».

Désormais, «il faut que la mise en œuvre soit à la hauteur des annonces » et «il ne faut pas hésiter à nous faire remonter les dysfonctionnements», a insisté Cédric O. «Cela fait dix ans que l’on construit ensemble la French Tech et il n’est pas question de tout laisser tomber».

Miren LARTIGUE